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Association Guillaume Fol

4 - À la foire de l'Étang Neuf

groupe

Le gouren (la lutte bretonne) se pratiquait nu-pieds,
en chemise de toile et pantalon ordinaire.
Il s'agissait avant tout
d'une épreuve de force qui mettait en jeu
bras, jambes et pieds.

 
 

En ce début de décembre 1710, Guillaume, accompagné de quelques voisins, se rend à la foire de Stang Nevez (l’Étang-Neuf), en Saint-Connan. Cette manifestation marque chaque année les dernières semaines avant Noël.

Guillaume y retrouve ses parents et amis des environs : Jean Pezron le meunier du moulin du Trieux, Pierre Le Ny de Plésidy, Jean et Nicolas Fol de Saint-Gilles-Pligeaux, Olivier Le Cocguen de Saint-Fiacre-entre-les-Bois, Guillaume Lucas et Pierre Pierre – qu’on surnomme Kerfol – de Saint-Gildas-du-Channeau. Thomas Riou – dit La Fortune – est présent lui aussi. C’est un habitué des foires. Tout à l’heure, on l’applaudira quand il sortira vainqueur du tournoi de Gouren (la lutte bretonne) après avoir porté un Taol biz Troat (prise de gouren portée avec les jambes : fauchage) à son troisième et dernier adversaire.

Aujourd'hui, Guillaume pense pouvoir vendre trois petits cochons et un demi-boisseau de chènevis (la graine du chanvre). Pour se mettre à l'abri du vent, il s'est installé au pignon d'une grange sur la gauche du chemin qui monte vers la chapelle du Logou. Jean Pezron, le meunier, s'est installé à côté de lui. Les gens passent et s'arrêtent à leur hauteur. Les conversations vont bon train ; une foire, c'est aussi l'occasion d'apprendre et de donner des nouvelles. Mais attention, tout en parlant, il faut rester attentif et se méfier des inconnus : malgré la présence de la maréchaussée, les vols sont fréquents sur les marchés et les foires.

Guillaume se souvient de ce dont il avait été témoin l'année précédente à la foire de Calédar : dans la foule qui déambulait, un homme qu'il ne connaissait pas avançait en chantant. Ses pas mal assurés laissaient penser qu'il avait trop bu. Mais il s'arrêta et fut rapidement entouré d'une bonne quinzaine de personnes, hommes et femmes, qui écoutaient ses chansons en riant. C'est alors que Guillaume vit l'une des femmes plonger la main dans la poche de Gilles Collin de Saint-Connan, la retirer aussitôt et s'éloigner sans attendre. Alors qu'elle croisait un homme, il vit bien leurs deux mains se rapprocher mais... Le souffle coupé, il donna enfin l'alerte : Arrêtez la voleuse ! Arrêtez la voleuse! Les badauds qui entouraient le chanteur la rattrapèrent sans difficulté mais les deux écus qui venaient d’être dérobés à Gilles Collin étaient déjà loin... et le chanteur aussi.

Les foires sont nombreuses et fréquentes dans la région. Mais elles ne rassemblent pas toutes autant de monde que celle de Stang Nevez.  Les gens hésitent à y venir de loin car les systèmes de poids et mesures sont multiples et complexes. Pour les grains, par exemple, chaque ville a son système de boisseaux (combles, marchands ou racles), godets, pots, poignées, petites et grandes seillées. À Mûr-de-Bretagne, le minot comble d’avoine ou de blé noir équivaut à peu près à 62 litres mais, à Chatelaudren, le boisseau d’avoine ou de blé noir correspond à 67,70 litres tandis que le boisseau de seigle (mesure racle) y vaut 39,30 litres. Que d’occasions de fraude et de procès ! 7

Mais pour les petits cochons, pas de problème ! Ils sont vendus à l'estime. Voici justement Jean Chevance qui s'approche de ceux de Guillaume. Il est accompagné de sa fille Bertrande. C'est maintenant une belle jeune fille sous sa coiffe de Saint-Connan. Elle doit bien avoir vingt ans ; c'est l'âge de chercher un galant... et la foire donne l'occasion de le faire sans en avoir l'air.
« Salud, dit Lom. N'eo ket tomm hiziv ! (Bonjour Guillaume, il ne fait pas chaud aujourd'hui.)
Sur, yen eo an amzer. (C'est vrai, le temps est froid.) »
... La conversation continue bien longtemps avant de s'intéresser enfin aux trois petits cochons... Après de longs marchandages, ce en quoi Guillaume et Jean sont experts l'un et l'autre, la marché est conclu pour le prix de quatre livres.
Guillaume n'a pas vendu son demi-boisseau de graines de chanvre mais midi est déjà passé depuis longtemps. Il faut rentrer à Kerscouarhat.

 

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